Le Salon mondial du tourisme à Paris a confirmé la tendance : les croisières, notamment polaires, ont le vent en poupe et mettent en danger un environnement encore vierge.
Petits bateaux d’expédition ou mastodontes flottants, les voyageurs raffolent apparemment de cette formule tout compris. Parmi ces offres, les croisières polaires se multiplient. Pourtant, alors que l’urgence climatique s’impose, ce succès pose question , surtout sur la prise de conscience des consommateurs des conséquences visibles et à long terme de leurs choix…
Un succès qui ne faiblit pas
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Après les années Covid-19, le marché de la croisière avait déjà dépassé son niveau de 2019 en 2023, avec une hausse de 7 %. En 2024, le marché mondial de la croisière a atteint 42 milliards de dollars de chiffre d’affaires (chiffres STATISTA), contre 33 milliards en 2018. En 2023, plus de 30 millions de personnes ont voyagé à bord d’un navire de croisière, soit dix millions de plus qu’en 2022. Les carnets de commandes des chantiers navals restent bien remplis.. La barre des 40 millions pourrait être franchie en 2027.
Ces voyages, souvent présentés comme immersifs et respectueux de l’environnement, attirent une clientèle sensible à la nature. Les compagnies mettent en avant des protocoles stricts : limitation du nombre de passagers à terre, utilisation de carburants alternatifs ou encore contrôle rigoureux des débarquements. Pourtant, ces mesures sont plus qu’insuffisantes pour compenser l’impact global de cette industrie sur des écosystèmes aussi fragiles …
Un impact écologique dévastateur
Les navires de croisière, même modernisés, restent extrêmement polluants. Ils rejettent des émissions massives de CO2, perturbent la faune locale et favorisent l’introduction d’espèces invasives. Les eaux de l’Arctique et de l’Antarctique, déjà bouleversées par le dérèglement climatique, subissent alors des pressions supplémentaires.
Ironie du sort, le succès des croisières polaires repose sur un attrait morbide : le tourisme de la « dernière chance ». Voir la banquise avant qu’elle ne disparaisse, observer les ours blancs avant qu’ils ne s’éteignent… Les voyageurs participent plus ou moins « involontairement » à l’accélération d’un processus qu’ils déplorent bien souvent.
Il suffit de visionner la publicité ci-dessus pour se rendre compte de l’absurdité de ces croisières. Quand je visionne cette pub, j’ai l’impression d’être dans un film américain dystopique type Elysium dans lequel on contemple un désastre passé depuis une base extérieure et protégée. Le contraste est affligeant. D’autant qu’ici, on ne contemple pas les destructions du passé mais bien le désastre en cours…
Une incohérence totale
Comment concilier discours écologique et promotion de telles expéditions ? Les entreprises vantent des « croisières responsables« , alors qu’elles exploitent des régions déjà vulnérables et demeurent un des moyens de transport parmi les plus polluants. On interdit les voitures en centre-ville, on blâme l’avion, mais on continue à développer des voyages dans les lieux les plus précieux de notre planète. J’avoue que parfois je désespère. Plutôt que de faire appel à la raison, on met en avant qu’on en a envie, que c’est peut-être la dernière fois qu’on pourra voir cette biodiversité et ces paysages magnifiques. Les mots me manquent !
Le boom des croisières, notamment aux pôles, illustre bien un paradoxe de notre époque : vouloir explorer la nature tout en contribuant à sa destruction. Si rien ne change, ces destinations ne seront bientôt plus qu’un souvenir. Réguler ce tourisme, voire en limiter l’accès, devient réellement impératif. On va me taxer d’être partisan d’une écologie punitive. Mais NON! C’est juste du pragmatisme et je pense, un peu de bon sens.