Le saumon évoque souvent l’image d’un poisson sauvage remontant les rivières pourtant la réalité est bien différente puisque, aujourd’hui, la quasi-totalité des saumons commercialisés provient d’élevages intensifs en mer.
Ces fermes marines, où des milliers de poissons sont entassés dans des bassins confinés, présentent des conditions de vie catastrophiques. Ce mode de production menace à la fois le bien-être des animaux, la biodiversité marine et l’équilibre des océans.
Une production mondialisée
La Norvège, pionnière de l’élevage du saumon en mer depuis 1960, domine aujourd’hui le marché avec près de 40 % de la production mondiale, suivie du Chili (20 % environ), du Canada et de l’Écosse. Ces quatre pays totalisent les neuf dixièmes de la production mondiale. Toutefois, cette expansion pose des problèmes environnementaux majeurs, notamment en terme de pollution et de risques sanitaires.
En France, bien que la production de saumon soit quasi inexistante, il s’agit de l’un des poissons les plus consommés. Chaque Français consomme en moyenne 4 kg de saumon par an, principalement importé de Norvège, qui fournit la quasi totalité du marché français. Avec plus de 200 000 tonnes importées en 2022, la France est l’un des plus grands importateurs mondiaux.
Deux grands projets industriels français inquiètent pourtant les élus : Pure Salmon en Gironde et Local Ocean dans le Pas-de-Calais. Ces fermes prévoient une production de 10 000 tonnes de saumon par an, soit cinq fois plus que la moyenne mondiale pour ce type d’installation. Il s’agit de projets « démesurés » qui pourraient avoir un impact environnemental majeur.
Des conditions d’élevage inacceptables
Les images capturées par des associations écologistes révèlent des saumons malades, rongés par des parasites comme le pou de mer. La surpopulation dans les bassins favorise la propagation de ces maladies. Le taux de mortalité atteint jusqu’à 25 % avant l’âge adulte. Si de tels chiffres étaient observés dans l’élevage terrestre, ils susciteraient un scandale.
Les parasites ne restent pas confinés aux fermes. Ils contaminent également les saumons sauvages qui migrent près des zones d’élevage. Près de 150 fermes sont situées à proximité des embouchures des rivières, exposant les populations sauvages à des contaminations massives. L’industrie du saumon refuse de reconnaître ces effets, bien que plusieurs rapports parlementaires aient déjà alerté sur la situation.
Un impact majeur sur la biodiversité
L’élevage du saumon affecte également d’autres espèces marines. Le krill, base de l’alimentation des saumons, est massivement pêché pour produire de la farine de poisson distribuée dans les élevages. Cette surexploitation menace les équilibres écologiques et prive de nombreux animaux marins de leur nourriture.
Par ailleurs, les saumons d’élevage échappés perturbent les populations sauvages. Ils se reproduisent avec les saumons locaux, affaiblissant la diversité génétique et rendant ces derniers plus vulnérables aux maladies. Cette hybridation aggrave le déclin des populations naturelles, déjà fragilisées par le dérèglement climatique. Le nombre de saumons sauvages a été divisé par deux depuis les années 1970.
On constate aussi de nombreux rejets organiques et chimiques (excréments, antibiotiques, pesticides) favorisant l’eutrophisation des eaux.
Des solutions insuffisantes
Certains éleveurs tentent de réduire l’impact environnemental en introduisant des poissons nettoyeurs pour éliminer les parasites. Toutefois, cette méthode reste inefficace à grande échelle. De plus, l’élevage terrestre en bassin fermé présente d’autres problèmes. Extrêmement énergivore, il consomme énormément d’eau et produit des rejets polluants.
Le projet d’usine à saumon au Verdon-sur-Mer illustre ces limites. Les besoins en eau et en énergie sont colossaux, et les risques de salinisation des nappes phréatiques inquiètent les spécialistes. Les promesses écologiques avancées par l’industriel ne résistent pas à l’analyse.
L’élevage intensif du saumon représente donc bien une menace majeure pour les écosystèmes marins. Il met en danger la biodiversité, favorise la propagation des maladies et détruit les ressources alimentaires des océans. Face à ces constats, une remise en question profonde de ce modèle est nécessaire. La réduction de la consommation et le soutien à des alternatives durables sont des leviers essentiels pour préserver les milieux aquatiques et les espèces qui en dépendent. Là aussi nous pouvons jouer un rôle déterminant en tant que consommateur.