Au printemps 2023, une étude européenne a révélé une diminution de 25 % des populations d’oiseaux en Europe en 40 ans : principale responsable, l’agriculture intensive.
Selon cette recherche, près de 800 millions d’oiseaux ont disparu depuis 1980. Cela représente une perte annuelle de 20 millions d’individus. Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences. L’étude souligne des variations du déclin selon les espèces et les pays.
Le PNAS, une étude majeure
L’étude que le PNAS a publiée en mai 2023 repose sur le plus vaste ensemble de données empiriques jamais réunis en Europe pour analyser l’impact des activités humaines sur la biodiversité aviaire.
Les chercheurs ont examiné les tendances de 170 espèces d’oiseaux communs, suivis sur plus de 20 000 sites dans 28 pays européens pendant 37 ans. Ils ont évalué l’influence de quatre pressions anthropiques majeures : l’intensification agricole, le changement de la couverture forestière, l’urbanisation et l’évolution des températures. Les résultats mettent en lumière l’impact prédominant de l’agriculture intensive, notamment l’utilisation accrue de pesticides et d’engrais sur la diminution des populations d’oiseaux à l’échelle continentale. L’urbanisation a un effet négatif, tandis que la modification des forêts a un impact variable selon les espèces. Le réchauffement climatique influence aussi les dynamiques de population, avec des effets différents selon les préférences thermiques des espèces.
Cette étude ne se limite pas à décrire des corrélations. Elle propose une approche analytique rigoureuse pour établir des relations quasi-causales entre les pressions humaines et l’évolution des populations d’oiseaux. Ces conclusions sont essentielles pour les décideurs politiques, les scientifiques et le public soucieux de la protection de la biodiversité et des effets du changement global.
Des chiffres accablants
Sur plus de 20 000 sites dans 28 pays européens, le nombre d’oiseaux vivant dans les champs a chuté de 60 % en 40 ans. La baisse atteint 20 % pour les oiseaux forestiers et 30 % pour les espèces urbaines. En France, les oiseaux agricoles et forestiers ont respectivement diminué de 40 % et 20 %. Certaines espèces, comme le moineau ou le tarier des prés, ont perdu plus de 60 % de leurs effectifs.
Voici les principales espèces en danger et leur déclin depuis 40 ans :
Espèce | Baisse |
---|---|
Alouette des champs | 50 % |
Moineau domestique | 60 % |
Hirondelle rustique | 50 % |
Tarin des aulnes | 50 % |
Bruant ortolan | 80 % |
Moineau friquet | 70 % |
Mésange charbonnière | 30 % |
Tourterelle des bois | 80 % |
Pie-grièche écorcheur | 80 % |
Fauvette à tête noire | 20 % |
La liste reste longue. Ces espèces, autrefois courantes, deviennent rares. En revanche, le nombre d’oiseaux nichant en ville a augmenté de 10 %. Ont-ils le choix ? Ces chiffres illustrent l’urgence d’agir pour préserver la biodiversité.
L’agriculture intensive, principal responsable
Dès 2019, un rapport du programme de Suivi Temporel des Oiseaux Communs avait confirmé le déclin de nombreuses espèces en France. Sur 30 ans, plus d’une centaine d’espèces courantes ont été recensées. Si une trentaine d’entre elles étaient en expansion, plus de 40 connaissaient un déclin. Parmi elles, le chardonneret, la tourterelle des bois et l’hirondelle de fenêtre.
Ces recherches confirment que l’activité humaine est responsable de ce déclin dramatique. Pendant longtemps, on a accusé les éoliennes, le dérèglement climatique, l’urbanisation, la perte d’habitat, l’éclairage nocturne, la chasse et les chats. Si ces facteurs jouent un rôle, ils ont surtout servi d’excuses à l’inaction politique. Une autre étude européenne, publiée en mai 2023, a levé toute ambiguïté. Le CNRS insiste sur l’urgence de revoir notre modèle agricole. L’usage massif d’engrais et de pesticides amène à une raréfaction des insectes et des graines, sources de nourriture essentielles. L’urbanisation, la perte d’habitats et le réchauffement climatique aggravent la situation.
Les oiseaux des villes, comme l’hirondelle et le moineau friquet, trouvent refuge en zone urbaine. Mais la destruction des cavités où ils nichent et la pollution diminuent leurs chances de survie. Les espèces des champs, comme l’alouette des champs et la perdrix, sont les plus touchées. En 40 ans, elles ont perdu la moitié de leurs effectifs. L’utilisation de pesticides, notamment les néonicotinoïdes, nuit aux insectes, leur principale ressource alimentaire. L’uniformisation des paysages agricoles détruit aussi leurs habitats naturels.
Le rapport est sans appel. L’agriculture intensive reste le principal coupable de l’effondrement des populations d’oiseaux. Elle appauvrit les sols par l’excès de produits chimiques et pollue les nappes phréatiques. Tant que nous n’aiderons pas les agriculteurs à changer leurs pratiques et que nous ne modifierons pas nos habitudes, rien ne changera. Ni pour nous, ni pour les oiseaux.