« C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain ne l’écoute pas. »
Attribuée à Victor Hugo, bien que cela ne soit pas certain, cette citation met en lumière l’aveuglement des hommes face aux leçons et à la sagesse que la nature leur offre. Sommes-nous sourds ou aveugles, stupides ou bornés ? Franchement, je ne sais plus quoi en penser. Pourtant, les conséquences de nos actions sur la planète, sur la biodiversité et sur les équilibres « naturels » sont multiples et de plus en plus visibles.
Sans doute ai-je choisi, durant une grande partie de ma vie, de demeurer dans l’ignorance, de rester aveugle et sourd, voire pire. Force est de constater que le monde qui nous entoure change, ou plutôt décline. Force est de constater également, comme le confirment de nombreuses études, que nous sommes, en tant qu’espèce, largement responsables de ces bouleversements.
Quand je parle de « nous », je fais référence à cette petite fraction de l’humanité qui consomme à outrance. Dans tous les cas, nous consommons toutes sortes de biens et services depuis près d’un siècle, sans réellement nous soucier des conséquences de ses actes.
Une humanité conquérante
Les humains ont profondément abîmé le monde au 19ᵉ et au début du 20ᵉ siècle par les guerres et les épidémies à répétition. Ainsi, rappelons que la population mondiale avoisinait les trois milliards en 1950. En moins de 100 ans, nous sommes passés à huit milliards d’habitants sur Terre… ce qui change tout. Avant 1950, les conséquences de nos actes avaient principalement un impact sur nous-mêmes.
Depuis l’après-guerres mondiales, la situation a changé de manière drastique. L’espèce humaine s’est développée comme une véritable épidémie à l’échelle mondiale. Nous avons colonisé chaque parcelle de terre disponible, exploité ces espaces uniquement à notre bénéfice. Les « responsables’ sont l’agriculture, l’industrie ou l’extraction minière. Nous avons pollué sans retenue l’eau, l’air et les sols. Nous avons réduit les autres espèces au statut de simples ressources ou outils. Les humains ont domestiqué près de 90 % des mammifères à l’échelle mondiale. La biodiversité a chuté à un point tel que cette extermination méthodique représente désormais un risque mortel, même pour nous, humains.
L’industrialisation effrénée, la quête de profit et la déconnexion progressive de l’homme avec la nature dans les sociétés modernes ne sont tout simplement pas soutenables. En tous cas, c’est une évidence si on ajoute une explosion démographique à l’échelle mondiale. Ceux qui prétendent le contraire mentent ou se voilent la face, cherchant à préserver un système qui les avantage.
Lutter contre le dérèglement climatique, la chute de la biodiversité, les diverses pollutions ne se décrète pas, malheureusement. Comment demander à des pays, qui ont contribué si peu à la dégradation de la planète de payer le prix de ces combats ? D’autant qu’ils sont souvent les premières victimes des excès du modèle économique occidental. Une équation impossible à résoudre, ou en tout cas, pas sans douleur.
Une nature qui parle
Depuis une dizaine d’années, il est impossible de nier que les conséquences de nos modes de vie deviennent à la fois visibles et catastrophiques. Pas besoin de longs discours. Voici quelques chiffres qui illustrent une réalité que nous pouvons tous constater dans nos vies, quelle que soit notre position sur le globe :
Les chiffres clés dans le monde
- 1,23 million de morts
- 4,2 milliards de personnes affectées
- 3.000 milliards de dollars (Coût économique estimé des catastrophes, soit le double de la période 1980-1999)
- 232 % d’augmentation des vagues de chaleur depuis 1999.
- 134 % d’augmentation des inondations mondiales depuis 1999.
- 15 à 30 % d’augmentation du niveau des précipitations par rapport au passé.
- 7 % d’humidité en plus dans l’atmosphère
- Fréquence des mégafeux multipliée par 2,2
- 68 % des populations de vertébrés disparues (entre 1970 et 2016).
- 40 % des insectes en déclin
- 2,5 % de masse des insectes perdue chaque année
- 75 % des cultures alimentaires en Europe dépendantes des insectes pollinisateurs
- 41 % des amphibiens et 27 % des crustacés menacés
- 75 % des milieux terrestres altérés
- 85 % des zones humides détruites
- 66 % des milieux marins détériorés
- 30 % des herbiers marins détruits au 20e siècle
- 33 % des récifs coralliens et plus d’1/3 des mammifères marins menacés
- 15 milliards d’arbres abattus chaque année
- 8,1 millions de décès en 2021 : Nombre de morts causés par la pollution de l’air à l’échelle mondiale.
Sources: IPBES/WWF/OMM et autres
Enfin, en 2024, l’humanité aura consommé ou détérioré des ressources équivalentes à 1,7 fois la capacité de régénération de la Terre. Nous sommes tous témoins de l’augmentation significative des catastrophes naturelles. On peut en dire de même pour la disparition de certaines espèces et de l’épuisement de nombreuses ressources naturelles. En 2004, le chanteur Mickey3D sonnait déjà l’alarme avec sa chanson « Respire« . Dans la version 2020 avec Biqflo & Oli, le constat est net, rien n’a été fait, rien n’a changé … Pourtant on savait déjà!
La planète ne cesse de nous montrer que nous allons droit dans le mur, et pourtant, rien ou presque n’est fait. Pire encore, aux États-Unis, on envisage d’augmenter le nombre de data centers pour l’IA et de forer toujours plus de puits de pétrole…
Un déni incompréhensible
Dans le film Don’t Look Up d’Adam McKay, Leonardo DiCaprio et Jennifer Lawrence incarnent deux astronomes. Ils entament une vaste tournée médiatique pour alerter l’humanité qu’une comète se dirige droit sur la Terre. Face à cette menace mortelle, la réaction est minime, marquée par un véritable « déni cosmique ».
En matière d’écologie, nous observons ce même déni. Voilà près de 50 ans que des experts issus de nombreuses disciplines lancent des alertes. Dès 1962, Rachel Carson dénonçait déjà l’utilisation de pesticides détruisant la biodiversité dans son livre Printemps silencieux. En France, dans les années 70, René Dumont tirait la sonnette d’alarme. En 1988, James E. Hansen, climatologue, déclarait devant le Congrès américain que la Terre se réchauffait, un problème majeur pour l’avenir de l’humanité. Et aujourd’hui encore, des figures comme Greta Thunberg, Jean Jouzel ou George Monbiot continuent de s’engager avec force. Pourtant, malgré des rapports scientifiques alarmants publiés depuis des décennies, aucune réelle mutation de nos sociétés n’a été mise en œuvre.
Ces rapports et études ont pourtant tous contribué à sensibiliser le public et les décideurs politiques aux enjeux environnementaux. Il en existe bien d’autres, en langue française ou anglaise, et la plupart sont consultables gratuitement en ligne. Les lire intégralement représente un travail conséquent, utile principalement pour les spécialistes. Cependant, les parcourir, observer l’évolution des données et des messages transmis est crucial pour mieux comprendre l’état du monde actuel.
Que dire de plus ? Rapports, événements multiples à l’échelle planétaire, alertes incessantes des scientifiques… Tout est dit, ou presque. Nous savons à quoi nous en tenir, mais nous n’agissons pas. Nous refusons de changer de système, de remettre en question nos modes de vie, alors même que cela est essentiel pour espérer maintenir un futur désirable.
C’est de cette incompréhension qu’est né SmogyLand…