L’intelligence artificielle est-elle le péril écologique tant redouté ou la technologie du siècle à côté de laquelle nous ne pouvons pas passer ?
Alors que le Sommet de l’IA de Paris se déroule au Grand Palais, une étude britannique vient demander la prise en compte de l’impact écologique de ces technologies avant d’envisager son développement à plus grande échelle. Une question se pose : peut-on encore réellement imaginer se passer de ces nouvelles technologies ? Accepterait-on de se passer de leur application dans de nombreux domaines de la vie de tous les jours ?
Rappelons que ce rapport de l’Université de Nottingham ne défend pas l’idée qu’il faut stopper l’IA ou la détruire. Il prévient juste des risques encourus du développement sans contrôle et à grande échelle de ces technologies. Il rappelle que celles-ci sont très gourmandes en ressources naturelles et en énergie.
L’IA est déjà dans nos vies
Nous faisons comme si c’était nouveau. Tout du moins, on nous fait croire que c’est tout neuf, permettant ainsi de susciter l’intérêt et de réaliser de belles levées de fonds. L’intelligence artificielle est pourtant déjà omniprésente. Qu’il s’agisse d’assistants vocaux, d’algorithmes de recommandation, d’optimisation industrielle ou encore d’outils médicaux avancés… On la retrouve bien entendu dans tous les logiciels GPS, de traitement de l’image, dans l’éducation, etc.
Se priver de l’IA?
Est-il réellement envisageable de se priver de l’IA pour sauver la planète ? Elle permet des avancées majeures en matière d’efficacité énergétique, d’optimisation logistique et même de lutte contre le changement climatique. L’enjeu n’est donc pas de choisir entre son adoption ou son abandon, mais bien de réguler son usage pour minimiser son impact.
Il est donc indispensable d’encadrer son développement, de favoriser des modèles moins énergivores. Il est aussi nécessaire de privilégier des infrastructures durables et de limiter les usages superflus. Plutôt que de céder à une fuite en avant technologique ou à un rejet total, la question clé reste : comment rendre l’IA soutenable sans freiner le progrès qu’elle promet ?
Si l’on observe bien ce qui se passe en ce début d’année 2025, c’est tout l’inverse qui se produit. Que ce soit aux États-Unis ou en France, les budgets alloués à la sauvegarde de l’environnement sont en baisse, tandis que les deux présidents font la promotion excessive de l’intelligence artificielle à coups de centaines de milliards.
Souhaitons-nous nous priver de l’usage du GPS dans nos voitures ? NON. Souhaitons-nous ne plus utiliser les traducteurs ou correcteurs en ligne ? NON. L’usage de ChatGPT ou d’un autre bot conversationnel doit-il être interdit alors qu’il permet de structurer à merveille un texte ou d’en extraire un sommaire en quelques clics ? Doit-on accepter de mourir d’un cancer alors que l’IA est certainement une des solutions d’avenir ? NON !
Ce serait grave dommage. Pourtant, si nous n’y prenons pas garde, comme le rappelle le rapport de l’Université de Nottingham, un développement trop rapide d’une technologie trop énergivore nous amènera sans aucun doute un peu plus vite dans le mur de nos excès. Il va donc falloir faire des choix. Faire le choix de l’intelligence artificielle n’est pas choisir entre péril existentiel et technologie salvatrice. Pour autant, nous ne pourrons pas fournir suffisamment d’énergie et de ressources naturelles pour tous nos usages.
Et c’est bien le rôle de nos politiques de dessiner un chemin, de réaliser ces choix. Des choix qu’ils ont été incapables de faire depuis près de 50 ans. Le privé et l’industrie se sont engouffrés dans la brèche ouverte par l’inaction politique, bien trop souvent sans se soucier de l’avenir. Seule la rentabilité immédiate et à court terme compte. L’État n’est plus là que pour jouer un rôle de palliatif assurantiel en cas de désastre.
Il serait souhaitable que la croissance débridée d’une IA non optimisée ne se réalise pas dans les années à venir, car, objectivement, nous ne pouvons plus nous en passer. L’absence d’encadrement de ces technologies accélérerait inévitablement leur propre effondrement à long terme ainsi que des dégâts irréparables sur l’environnement, tout comme nous l’avons laissé faire avec l’industrie pétrolière. Nous en payons déjà le prix.