Une jeune fille de 15 ans vient de mourir, poignardée par un « camarade » dans un lycée de Nantes, le symptôme d’un monde malade, d’un monde à la dérive, d’un monde sans sens.
L’onde de choc traverse la ville de Nantes et le pays tout entier. Parents hagards, enfants confinés, caméras irrespectueuses, la sidération s’installe. Mais surtout, une question lancinante revient à chaque fois qu’un geste de violence exacerbée intervient : comment pouvons-nous continuer dans ce monde qui produit de telles conséquences sans nous remettre en cause?
Quelque chose cloche
Chaque jour, la société prescrit, compresse, tranquillise. Elle médicalise la souffrance sans chercher à la comprendre ou à l’éliminer. Elle masque les symptômes sans questionner les causes. La France reste l’un des champions d’Europe en terme de consommation de médicaments. En moyenne : plus de 40 boîtes par an, par personne. Ce chiffre dit tout. Nous nous défendons pas mal aussi sur la consommation de drogues diverses et variées, d’alcool etc … Notamment chez les jeunes qui consomment vite et fort, poussant les conséquences vers les extrêmes!
Alors, je ne sais pas ce qu’il en est de ce jeune qui a agi cet après-midi d’avril mais force est de constater qu’il n’y a pas besoin d’être psy pour constater qu’il y a quelque chose qui cloche dans notre manière d’élever nos enfants, de leur faire espérer en un monde désirable et au mimimum viable.
Les services de psychiatrie des hôpitaux publics ont vu l’an dernier un tiers de jeunes en plus. Pas avec plus de moyens. Avec les mêmes. Parfois, moins. Les soignants alertent sur l’état du système de santé et notamment de la psychiatrie. Mais on préfère des slogans. « Éco-anxiété », « harcèlement scolaire », « crise post-Covid », « embrigadement sur les réseaux ». Oui, tout cela existe. Mais le malaise va bien plus loin.
Nous avons désensibilisé notre futur
Loin de moi de justifier ou de tenter d’expliquer la réaction de ce jeune qui visiblement avait besoin de soins psychiatriques. Aucune justification ne peut expliquer ses actes. Mais pour autant, ce genre d’actes, comme bien d’autres dans notre pays ou à l’étranger est révélateur d’un malaise général.
Quitte à me répéter, nous devrions sincèrement et sérieusement nous demander quel monde nous offrons à nos enfants ? Un monde à bout de souffle, sans récit collectif, sans horizon enthousiasmant. Le dérèglement climatique ou la chute de la biodiversité deviennentt des sources d’angoisse. Pas un appel à créer. L’avenir ressemble à un mur.
Il ne s’agit pas d’accuser. Ni les parents (encore que), ni l’école (enfin ?), ni les médecins, ni les écolos qui alertent … Pourtant, il y a bien des causes voire des responsables à ce genre d’acte mortifère. Et honnêtement, j’en vois une principale : le manque de vision, le manque de projets enthousiasmants pour l’avenir. Plutôt que de colmater les brèches, inventons des projets. Mobilisateurs. Concrets. Des chantiers de réparation du vivant. Des écoles qui enseignent le soin, la coopération, l’espoir. Une écologie de l’action, pas de la panique.
Si l’écologie n’est pour moi en rien punitive (ou tout du moins quand elle l’est, c’est à juste titre), elle n’est pour autant aucunement motivante car elle ne propose aucune perspective à plus ou moins court terme qui donnerait envie de s’investir. Nous avons laissé peu à peu la peur remplir le vide laissé par l’absence de sens dans nos sociétés dites « occidentales ».
Un mal-être généralisé.
Un adolescent a sorti un couteau. Ce geste tragique n’est pas un bug isolé. Il nous interroge tous. Dans ce monde ultra-connecté, pourquoi les jeunes se sentent-ils si seuls ? Pourquoi 10 millions de Français vivent une éco-anxiété certaine ? Pourquoi la violence, même silencieuse, monte partout ?
La réponse ne viendra pas d’une molécule miracle, c’est certain. Soigner les malades est une évidence, faire tout pour que la maladie ou la perversion n’arrive pas en est une autre. La réponse viendra d’un récit. D’un cap. D’une société qui ne dit plus seulement « protège-toi ou méfie-toi de l’autre», mais plutôt « construisons ensemble ». Changer notre rapport au monde, ce n’est pas un luxe. C’est une urgence.