Autrefois un luxe réservé aux plus aisés, la climatisation est aujourd’hui un équipement en plein essor dans de nombreuses régions du monde.
Avec l’augmentation des températures estivales, les climatiseurs sont devenus un moyen efficace de réguler la température intérieure des bâtiments. Cependant, on peut lier cette demande croissante à l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre et la surconsommation électrique due à une utilisation excessive.
L’étude de l’ADEME
On le constate tous, la climatisation est de plus en plus présente dans les foyers et les entreprises. Avec la multiplication des vagues de chaleur ces dernières années, le taux d’équipement a augmenté de façon significative. Passant de 14 % en 2016 à 25 % en 2020 pour les ménages (et plus de 30% en 2024!). Cette tendance a des conséquences directes sur l’environnement.
Dans cette optique, l’ADEME a publié une étude intitulée « La climatisation de confort dans les bâtiments résidentiels et tertiaires ». Ce document de plus de 100 pages est disponible gratuitement sur le site de la librairie de l’ADEME. Il vise à dresser un état des lieux de la consommation énergétique et des émissions de gaz à effet de serre de ces équipements.
L’étude met en avant une augmentation constante du taux d’équipement en climatisation, qui varie selon plusieurs critères. Toutefois, des disparités existent en fonction du type d’habitation, de la catégorie socio-professionnelle et du lieu de résidence. Par exemple, les maisons individuelles sont plus équipées que les logements collectifs, sans doute pour des raisons de facilité d’installation. De même, les habitants du Sud-Est et de la Corse disposent de plus de climatiseurs que ceux de Bretagne. Pourtant, avec les températures relevées en Bretagne en 2022, il n’est pas exclu que ces régions s’équipent davantage. Enfin, les populations aisées sont deux fois plus équipées que les populations défavorisées.
Dans le secteur tertiaire, moins de 10 % des surfaces des bâtiments d’enseignement sont climatisées, contre plus de 60 % pour les bureaux. Les centres commerciaux sont presque tous équipés. En 2020 et 2021, près d’un million et demi de climatiseurs ont été vendus. En 2023, on a frôlé le million. Dans les années 2000, malgré la canicule de 2003, les ventes annuelles s’élevaient entre 300 000 et 500 000 unités.
Il existe plusieurs technologies de climatisation avec des niveaux de consommation et d’émissions différents. Les climatiseurs mobiles sont fréquents dans les appartements, tandis que les pompes à chaleur réversibles équipent surtout les maisons individuelles. Les groupes de froid sont présents dans les grands immeubles, et les systèmes de toit dans les entrepôts et les grandes surfaces commerciales. Les climatiseurs mobiles ont le rendement énergétique le plus faible et consomment deux à trois fois plus d’électricité que les autres systèmes. La climatisation réversible correspond à une pompe à chaleur air/air capable de produire de l’air chaud et froid selon les besoins. En hiver, la PAC air/air récupère les calories présentes dans l’air extérieur grâce à un fluide frigorigène. Celui-ci, sous l’effet du compresseur, se transforme en gaz. Cependant, la climatisation réversible ne permet pas de produire de l’eau chaude sanitaire.
Ces technologies contribuent aussi aux émissions de CO2, principalement à cause de leur consommation d’énergie. En 2020, on évaluait la consommation d’énergie des climatiseurs résidentiels à 4,9 TWh, dont 75 % provenaient des maisons individuelles. Dans le secteur tertiaire, elle atteignait 10,6 TWh, les bureaux et les commerces en consommaient 75 %.
Enfin, les émissions de gaz frigorigènes des climatiseurs ont un impact encore plus significatif sur les émissions de gaz à effet de serre. Ces émissions surviennent lors de la fabrication, de la maintenance et des fuites pendant l’utilisation. Les gaz frigorigènes possèdent un fort pouvoir de réchauffement climatique. Ils génèrent des émissions de gaz à effet de serre au moins deux fois supérieures à celles dues à la consommation d’électricité.
La climatisation dans le monde
En 2021, les ventes de climatiseurs individuels ont atteint plus de 126 millions d’unités dans le monde, ce qui représentait une augmentation de 3 % par rapport à l’année précédente. Les ventes ont augmenté de manière significative en Inde (plus de 25%), en Amérique du Sud (10%), en Amérique du Nord, en Chine …

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Voici quelques chiffres significatifs
- 1,5 milliard : nombre de climatiseurs dans le monde en 2021.
- 10 nouveaux climatiseurs vendus chaque seconde.
- 37 % de la consommation mondiale d’électricité des bâtiments provient de la climatisation.
- 25 % d’augmentation des besoins énergétiques liés à la climatisation d’ici 2050.
- Plus de 2°C d’élévation locale des températures urbaines à cause du rejet de chaleur des climatiseurs.
- 45 % du marché mondial en 2022 : part de la Chine.
- 5,5 % prévue jusqu’en 2025 : croissance du marché mondial.
- 5 milliards d’unités : nombre probable de climatiseurs en 2050.
Autrement dit, l’utilisation des climatiseurs dans le monde, que ce soit dans le domaine résidentiel ou de l’entreprise, on atteint près de 10% de la consommation mondiale. Nous ne sommes pas dans des chiffres inférieurs au pourcent mais bien dans des grandeurs significatives. Est-il sérieux d’envisager de multiplier par 3 le nombre de climatiseurs à l’horizon 2050?
Un modèle contre-productif
La climatisation a un impact important sur l’environnement, comme le montre l’exemple de la France où elle représente 5% des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments résidentiels et tertiaires. Au niveau mondial, ce chiffre est encore plus élevé, les climatiseurs étant responsables de plus de 10% des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur du bâtiment.
Il faut enfin rajouter l’air chaud rejeté à l’extérieur par la climatisation. Cela contribue à l’augmentation des températures en ville, ce qui encourage encore plus son utilisation. On installe des systèmes énergivores et émetteurs qui provoquent à long terme l’inverse de l’effet voulu…
Des solutions plus écologiques sont en développement, notamment la climatisation solaire qui nécessite une surface de panneaux solaires suffisante pour fonctionner. En 2022, les énergies renouvelables ont produit environ 12% de l’électricité mondiale. Nous sommes encore loin de pouvoir fournir ces systèmes solaires à court terme. Une autre solution est le rafraîchisseur d’air évaporatif, qui utilise l’évaporation de l’eau pour refroidir l’air ambiant. Là-aussi, nous sommes encore loin de la généralisation.
L’essor de la climatisation est indéniable et répond à un besoin de confort thermique dans nos habitats. Cependant, il est important de prendre en compte les impacts environnementaux de cet équipement. Leur utilisation est responsable de la hausse des émissions de gaz à effet de serre et de la contribution aux îlots de chaleur urbains. Des solutions alternatives plus écologiques existent mais leur généralisation n’est pas d’actualité.