La mode et la consommation que nous en faisons parfois n’est ni durable, ni responsable.
L’avènement de la fast-fashion a conduit à une augmentation exponentielle de la production et de l’élimination des vêtements. La mode « éphémère » se caractérise par l’introduction fréquente de nouveaux styles à des prix très abordables. Plutôt que d’adapter la production à la demande, on privilégie une surproduction constante pour proposer les prix les plus bas. L’objectif est de stimuler en permanence l’achat. Il n’y a pas de véritable recyclage en fin de vie. Un modèle anormal et intenable, dont nous sommes responsables. En effet, nous achetons trop souvent en fonction du prix, plutôt que de privilégier la qualité.
Un modèle intenable
Un rapport de l’UE explique que la production excessive de textiles entraîne une surconsommation de ressources naturelles, une évidence. En effet, l’industrie textile nécessite une quantité considérable d’eau et de terres pour cultiver le coton et d’autres fibres. L’industrie mondiale du textile et de l’habillement utilise un peu moins de 100 milliards de mètres cubes d’eau, tandis que les besoins en eau de toute l’économie européenne s’élèvent à un peu moins de 300 milliards de mètres cubes. Un chiffre tout simplement astronomique !
La quantité de vêtements achetés par personne dans l’UE a augmenté de 40 % en seulement quelques décennies. Cette consommation est soutenue par la baisse des prix et l’accélération de la livraison de la mode aux consommateurs. Autant le dire, un modèle de consommation peu responsable et non viable à long terme. Les vêtements représentent entre 2 % et 10 % de l’impact environnemental de la consommation dans l’UE. En 2020, la consommation textile par personne nécessitait, en moyenne, 400 mètres carrés de terres, 9 mètres cubes d’eau et un peu moins de 400 kg de matières premières.
Cet impact est souvent ressenti dans des pays tiers, où la majorité de la production a lieu. La fabrication des matières premières, leur transformation en fibres, le tissage des tissus et la teinture nécessitent d’énormes quantités d’eau. À cela, il faut ajouter des produits chimiques, y compris des pesticides pour la culture du coton. L’usage des vêtements par les consommateurs contribue également à l’empreinte environnementale élevée du secteur. On utilise de l’eau, de l’énergie et des produits chimiques pour le lavage, le séchage en machine… Sans oublier les microplastiques rejetés dans l’environnement. Moins de la moitié des vêtements usagés sont collectés pour être réutilisés ou recyclés. Seulement 1 % est recyclé pour fabriquer de nouveaux vêtements. Les technologies ne permettent pas toujours de recycler les textiles en fibres vierges.
Les États-Unis, qui représentent seulement 5 % de la population mondiale, sont le troisième plus grand consommateur d’eau douce. Leur consommation annuelle atteint 1 000 milliards de mètres cubes, derrière la Chine et l’Inde (1 200 milliards de mètres cubes). Rapportée à la population de chaque pays, la consommation des États-Unis est de loin la plus élevée.
La consommation mondiale d’eau est en constante augmentation. L’agriculture est particulièrement concernée par le déséquilibre croissant dans l’accès à cette ressource. La consommation totale d’eau devrait doubler dans les décennies à venir. En 1960, l’humanité consommait environ 2 000 milliards de mètres cubes d’eau par an. Ce chiffre est passé à 4 000 milliards après les années 2000. Les estimations pour 2100 avoisinent les 10 000 milliards de mètres cubes par an. Or, avec le changement climatique, les ressources en eau disponibles se raréfient de plus en plus.
La fabrication d’un simple t-shirt en coton nécessite environ 2 500 litres d’eau douce. Comparé à la consommation annuelle d’eau potable par personne en Europe, qui est d’environ 500 à 600 litres, ce chiffre laisse sans voix !

L’industrie textile est l’une des plus grandes consommatrices d’eau au niveau mondial. Selon certaines estimations, elle représente environ 20 % de la pollution de l’eau à l’échelle mondiale. On utilise l’eau à plusieurs étapes du processus de fabrication textile. Principalement pour le nettoyage, le rinçage, la teinture et le traitement des tissus. De grandes usines de textile peuvent consommer des quantités massives d’eau chaque jour. Pour produire un kilogramme de coton, on utilise plusieurs milliers de litres d’eau. Ce chiffre prend en compte l’ensemble du processus, de la culture à la production textile.
L’industrie de la mode serait responsable de 10 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone. Cela dépasse ainsi les émissions combinées de l’ensemble de l’aviation et du transport maritime international.
Selon l’AEI/EEA, les achats de textiles dans l’UE en 2020 ont généré des émissions de CO₂ équivalentes à 270 kg par personne. Ce qui équivaut à un total de 121 millions de tonnes de gaz à effet de serre. Quand on sait que l’objectif devrait être de 2 tonnes d’équivalent CO₂ par an et par personne … Il est évident que le modèle actuel de la fast-fashion n’est plus viable.
Et si on changeait ?
Changer ses habitudes n’est pas chose facile. Surtout dans ce domaine de la mode dans lequel le regard de l’autre compte. Il était particulièrement difficile, il y a encore quelques petites années, d’avouer s’habiller sur des sites comme Vinted ou dans une friperie. Et pourtant, le système se démocratise. S’il n’est pas parfait, ce marché de l’occasion est vraiment à encourager, malgré des limites. Effectivement, n’acheter que de l’occasion n’est pas viable à long terme. Il met en danger de nombreuses filières. Vendre ou acheter des produits d’occasion situés à plusieurs milliers de kilomètres de chez soi est aussi un non-sens écologique.
Maintenant, lorsqu’on veut se tourner du côté du neuf, c’est souvent plus difficile même si là aussi de nombreuses solutions existent.
Qu’est ce qui coince? En réalité, de nombreux paramètres sont à prendre en compte:
– Pour commencer l’origine du produit (matière première et fabrication): acheter totalement français est possible, je vais en donner un exemple formidable dans les lignes qui suivent. Acheter européen est souhaitable aussi, encore faut-il pouvoir tracer le produit. Certains vendeurs ont fait de gros efforts dans ce domaine. Ils proposent une traçabilité exemplaire de toute la chaîne de production. En effet, rien ne sert d’acheter de la qualité si c’est pour la faire venir de l’autre bout du monde. Acheter près de chez soi, c’est aussi une garantie d’un respect minimum du personnel qui travaille dans les usines et d’un « faible » coût du transport.
– La matière: il va être préférable d’acheter du lin ou du coton bio. Cela a un prix certain mais pour autant, il est possible de sélectionner ses vêtements en mettant comme priorité la matière et la provenance.
– Le recyclage: quand on sait que de grandes enseignes de e-commerce internationales se permettent de brûler des vêtements non vendus ou simplement retournés car pas à la bonne taille, choisir des vendeurs qui assurent le lavage du vêtement avant remise en rayon est essentiel.
Disons le tout de suite, choisir de tels vêtements à un coût certain. La question à se poser est la suivante: en achetant ces produits qui seront plus durables, qui impactent moins l’environnement, qui n’utilisent pas de la main d’oeuvre maltraitée et sous payée, je fais du bien à la planète et à moi-même en évitant des pollutions inutiles. Je réoriente aussi la demande qui à un moment ou à un autre réorientera celle de l’offre. C’est là que nous pouvons agir en tant que citoyen.
Voici plusieurs cas concrets qui permettent d’acheter sans dégrader massivement notre environnement: Pango-Lin, Le T-shirt Propre, Lemahieu et 1083.fr.
Pango-Lin

C’est la marque française de référence en ce qui concerne les produits fabriqués en France avec du lin cultivé en France. Un rayon Homme, un rayon Femme avec peu de produits mais de qualité. J’ai déjà commandé une dizaine de T-shirt chez eux et c’est de la qualité. allez faire un tour sur leur site et vous découvrirez une nouvelle manière de faire du commerce. Une question, un mail et vous avez la réponse dans les 48h avec toujours un interlocuteur à l’écoute et efficace. Des tarifs autour de 50 euros en moyenne. Je ne détaille pas plus car tout est expliqué sur le site.
C’est mon favori et je vous incite à les soutenir car la période n’est pas simple pour le Made in France en ce moment!
Le T-shirt Propre
C’est une entreprise française spécialisée dans la fabrication et la vente de vêtements écologiques et durables. Elle se distingue par son engagement en faveur d’une mode respectueuse de l’environnement inscrite dans un modèle de consommation responsable. L’entreprise met un point d’honneur à assurer une totale transparence sur sa chaîne d’approvisionnement et s’efforce de minimiser son impact écologique à chaque étape de la production. Cela inclut l’utilisation de matières premières durables, comme le coton biologique et les fibres recyclées, ainsi que des procédés de teinture et de fabrication respectueux de l’environnement.
Au-delà de son engagement écologique, Le T-shirt Propre veille également à garantir des conditions de travail équitables pour les travailleurs tout au long de sa chaîne d’approvisionnement, en collaborant uniquement avec des fournisseurs respectant des normes sociales et éthiques strictes.
J’ai déjà commandé chez eux, et je dois dire que leur service est exceptionnel : le choix de vêtements est simple et efficace, et le service client ainsi que le service retour sont à l’écoute et très réactifs. En juin, j’ai commandé trois t-shirts pour un total de 123,50 €. Certes, ce n’est pas donné, mais la qualité est au rendez-vous. Pas étonnant que ces t-shirts puissent durer cinq ou six ans sans se déformer ! Toute la traçabilité du produit est accessible, comme le montre la capture d’écran suivante, issue de ma commande du t-shirt en lin 100 % français. Et je peux vous garantir qu’il est magnifique et très agréable à porter.
Petite remarque : mieux vaut ne pas avoir des bras trop musclés, à moins d’aimer être bien serré au niveau des manches. J’ai signalé ce détail par mail et j’ai reçu dans la journée une réponse charmante m’indiquant que ma remarque avait été transmise aux concepteurs. Ce n’est pas partout qu’on bénéficie d’un tel échange !
Quelques infos pratiques :
- Le guide des tailles est précis et fiable, donc franchement, impossible de se tromper.
- Le retour est gratuit en cas d’échange de taille, mais si vous souhaitez un remboursement, 10 € seront prélevés pour couvrir le nettoyage du vêtement avant sa remise en vente.
C’est un autre prix, certes, mais aussi une toute autre philosophie !
La philosophie est différente: allez faire un petit tour du côté de leur page de présentation, je ne ferai pas mieux. En 2014, l’entreprise a ouvert son premier atelier de confection de jeans à Romans-sur-Isère. Alors qu’un jean issu de la fast-fashion peut parcourir jusqu’à 65 000 kilomètres, tous leurs modèles sont fabriqués dans un rayon de 1083 kilomètres, ce qui inclut les étapes de tissage, d’ennoblissement, de coupe, de couture et de délavage, et parfois même la filature et la teinture. Pourquoi 1083 kilomètres ? Parce que c’est la distance qui sépare les deux villes les plus éloignées de la France métropolitaine, Menton dans le sud-est et Porspoder au nord de Brest. Fallait y penser, non ?
Les prix sont un peu moins élevés qu’avec Le T-shirt Propre mais la qualité semble au rendez-vous et l’esprit me plaît, même si tout n’est pas fabriqué en France cette fois-ci. Pour les tee-shirts, la culture du coton est faite en Turquie et souvent la filature en Allemagne. On retrouve aussi des coupes et confections réalisées chez Lemahieu, célèbre marque française. On a ici des tee-shirts épais, 180 grammes au mètre carré contre une moyenne dans la fast-fashion de 120 à 130 grammes! En gros, des produits de meilleure qualité et plus résistant. La suite fin août après ma commande.
LeMahieu
La qualité. Savoir-faire et engagement avec la fabrication de vêtements et sous-vêtements 100 % français, à Saint-André-lez-Lille dans les Hauts-de-France. Vêtements certifiés (Origine France Garantie, France Terre Textile, OEKO-TEX), LeMahieu privilégie des fibres responsables comme le coton bio et le lin local. J’ai trois Tee-shirts de la marque depuis 4 ans, ils n’ont pas bougé. C’est plus cher (de 70 à 100 euros) mais la qualité est là!
Il existe bien d’autres vendeurs qui sont dans cet esprit du « local », du respect de l’environnement et des personnes qui travaillent. On citera par exemple les marques Loom (dont le slogan est « Achetons moins. Produisons mieux »), Le Slip Français, Ecclo etc … On les reconnaîtra bien souvent avec un logo Origine France Garantie ou grâce à des labels type SLOWEARE. Ce sont de petites marques qui ont besoin qu’on les soutienne pour exister et inverser les tendances. En cherchant bien, vous en trouverez dans tous les domaines de l’habillement: de la chaussure aux accessoires de mode. Des labels du type GOTS permettent aussi de garantir une production équitable, respectueuse de l’environnement et des personnes…
Il n’y a plus d’excuse si ce n’est celle du budget car, force est de constater que s’habiller en respectant l’environnement coûte plus cher. Cela reste cependant dans le domaine du faisable si on réduit inévitablement la quantité. Il est nécessaire de faire un reset de nos habitudes. Pour l’été prochain, commencez par vous y préparer: mettez quelques euros par-ci par-là de côté, sélectionnez 4 ou 5 pièces qui vous plaisent parmi tout ce choix et complétez avec 2 ou 3 autres pièces plus conventionnelles. Au lieu de commander à chaque saison une dizaine de vêtements, vous en commanderez 5 de bonne qualité qui dureront quelques années et vous compléterez de temps en temps avec des marques plus courantes. Vous verrez qu’à la fin des comptes, dans cinq ans, vous aurez fait des économies. Le raisonnement peut certainement s’appliquer à tous les domaines de la mode.
Faisons ensemble le pari que cela peut marcher et vous verrez que le monde changera, que les industriels changeront, que les politiques iront dans ce sens en voyant que c’est possible! Sinon, on est mort.